jeudi 3 juillet 2014

✿ Chapitre 14 ✿

13h30, il arrive enfin. Ca fait maintenant 20 minutes que je poirote. Décidemment, son caractère a changé lui aussi, mais ça fait tellement longtemps qu’on ne s’est pas vus que je suis incapable de lui en vouloir. Nous nous dirigeons vers un petit resto sympa, près de l’école. On commande chacun une salade que nous mangeons vite pour parler plus tranquillement.

-          Alors, les cours ca se passe bien ici ? Me demande-t-il
-          Oui, j’aime bien. J’ai eu ma première année haut-la-main en plus. Et toi, tu fais quoi maintenant ? En fouinant un peu, je devrais savoir comment il en est arrivé là
-          J’ai fais une année de commerce mais j’ai arrêté. Maintenant, j’ai assez de fric pour vivre confortablement trois vies sans travailler. S’expliqua-t-il en affichant un grand sourire
-          Et depuis quand ? J’y suis presque
-          Au début de l’été, mon grand-père paternel est mort et il se trouve qu’il nous avait caché une grande partie de son argent, allant jusqu’à nous demander une aide financière de temps en temps. Mais mon père est son unique héritier parce qu’il n’a pas de frères et sœurs donc c’est nous qui avons tout reçu. Et me voilà donc, riche jusqu’à ma mort, comme mon grand-père et mon père.

J’étais sans voix. Tom était mon cousin tu côté de ma mère alors je n’étais pas au courant de la mort de son grand-père. Je n’étais pas non plus au courant de sa situation financière.

-          C’est pas mal. Je m’amuse plus comme ça, j’ai tout ce que je veux et je me tape qui je veux quand je veux. Mais j’ai peur. J’ai peur de n’avoir plus rien à désirer très vite. De me lasser de tout ça.
-          Je peux t’aider à tout dépenser si tu veux ! Riais-je

Il riait aux éclats m’assurant qu’il n’en doutait pas.

-          Tu fais quelque chose ce soir ? Me demanda-t-il
-          Bah j’ai une grosse journée moi aujourd’hui… J’ai cours jusqu’à 18h30 mais après normalement non.
-          D’accord. On se retrouve devant la grille à 16h30.
-          Mais…
-          Sois à l’heure.

Il avait l’air sérieux. Je lui avais pourtant dit clairement que j’aurai cours jusqu’à 18h30… Mais il avait cette intonation dans la voix et cet inhabituel air sérieux sur le visage… Je n’avais pas réussi à dire non. Aucune négociation ne semblait possible.
« TUT TUT », un bruit de klaxon retentissait dans la rue habituellement si calme. Il était 16h40 et je pressais le pas pour arriver à la voiture coupée sport de Tom.

-          Je ne sais pas ce que tu as prévu, Tom, mais je reprends les cours dans une demie heure. Je te l’ai dit tout à l’heure. Lui dis-je, un peu énervée
-          Du calme ! On va bien s’amuser tu vas voir. Et puis tu seras à l’heure, c’est bon. M’assura-t-il

Nous roulions à toute vitesse mais je n’osais pas faire de remarque. Il conduisait n’importe comment, dépassait les limites de vitesse… Qui sait, il avait peut-être acheté l’examinateur pour avoir son permis ? Ca ne m’étonnerait pas plus que ça. Il ralentissait finalement pour rentrez dans un sous-sol, le parking d’un centre commercial que je ne fréquentais que très peu. Il était entièrement composé de boutiques de luxe dans lesquelles je ne posais jamais un pied. Vous savez, ce genre de boutiques dans lesquelles on ne se sent pas à sa place à moins de se balader avec 1000€ en cash dans les poches. Ce genre de boutiques où les vendeuses sont aussi hautaines que les clientes, où on se sent petite à moins de se trouver perchée sur de hauts escarpins. Ce genre de boutiques où tu es perçue comme excentrique à moins d’être enfermée dans un ensemble tailleur digne des plus grandes femmes d’affaires. Le genre de boutiques dans lesquelles je n’ose pas entrer, par peur de faire tâche. Mais Tom ne partageait visiblement pas mon point de vue et avait décidé de m'y traîner.

-          Je te préviens Tom, je n’y entrerai pas. En plus, je n’ai pas de quoi me payer ce genre de choses et tu le sais très bien…
-          Mmh mmh. Il ne semblait pas convaincu. T’en penses quoi de la robe là ?
-          Elle est magnifique mais elle coûte une blinde ! Et puis, elle ne m’ira jamais…
-          Aller hop, on va l’essayer !

Il m’a coupé la parole et attrapé le bras avant même que je ne puisse protester. En 5 minutes, j’avais croisé les regards interrogatifs d’une dizaine de commères qui devaient déjà se demander ce qu’une fille comme moi faisait dans une boutique comme ça avec un mec comme lui. J’étais maintenant dans une cabine d’essayage qui faisait la même taille que deux cabines dans mes magasins habituels. J’essayais la robe et restait fixée devant le miroir. J’avais toujours aimé les belles choses et je devais avouer que cette robe en était une à mes yeux. Cette robe aurait rendu belle n’importe quelle femme qui se serait glissée dedans. Je tournais et me regardais dans les trois miroirs mis à ma disposition. Tom entrait sans toquer ni prévenir et ajustait la robe sur mes hanches.

-          Tu vois, elle te va très bien. J’en étais sur. J’ai l’œil pour ce genre de choses.
-          Oui, elle est jolie… Je ne parlais pas fort, je ne voulais pas me faire remarquer
-          Il faut que tu t’impose Lola. Parle fort, tant que tu es avec moi, tu es à ta place ici. Tant que tu es avec moi, tu as de quoi acheter plus que toutes ces femmes réunies.
-          Ca ne te fait pas peur d’avoir tout cet argent ? Je veux dire, tu n’as pas peur de « mal le dépenser », de faire une bêtise ou de ne plus rien avoir demain ?
-          Si, un peu. Mais on s’y habitue et puis je me dis qu’il ne vaut mieux pas penser à ce genre de choses, plutôt imaginer ce que je ferais de mon argent demain… Tiens, je t’ai trouvé des chaussures, un sac et une montre pour aller avec, essaye-les.
-          D’accord.

J’ajoutais les nouveaux éléments à la tenue. C’était parfait. J’avais des étoiles  dans les yeux, je me trouvais vraiment belle dans cette tenue. Mais ma joie ne fut que de courte durée, je revenais durement à la réalité de mon budget.

-          Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu me fais essayer tout ça en sachant que ça va me plaire alors que je n’ai pas de quoi acheter ne serait-ce qu’une seule de ces chaussures ?
-          Parce que c’est cadeau. Je t’offre la tenue entière.
-          Non ? C’est une blague. Je peux pas accepter Tom ! C’est… c’est trop. Je n’en croyais pas mes oreilles
-          Non, je t’assure. On ne se voit jamais alors je tiens à marquer le coup ! Considère ça comme un petit cadeau, les 2 mois sont loin d’être écoulés. Change-toi, on va aller payer.

Je commençais à enlever mes chaussures et les accessoires sans un mot. Il restait planté derrière moi et ne semblait pas prévoir de bouger. Je le regardais fixement dans l’espoir qu’il comprenne que j’avais envie qu’il parte mais il faisait comme s’il ne comprenait pas et préférait s’assoir sur le petit tabouret molletonné à côté de moi.

-          Il faut que je me change, Tom.
-          Oui, on aura du mal à payer sinon…
-          Non mais ça veut dire qu’il faut que tu sortes.
-          Il y a la place pour deux ici, je me trompe ?
-          Je ne te parle pas de place, Tom !
-          Roh ça va, on est de la même famille, non ? Tu n’as pas à être gênée. Tu peux te déshabiller devant moi, je t’assure que ça ne me dérange pas.
-          Et moi alors, tu ne penses pas que ça me dérange ?
-          Lola, c’est moi qui te paye la tenue. Je pense y avoir droit non ? Je t’offre un cadeau, c’est à ton tour. Il arborait un sourire en coin qui n’avait rien de rassurant

Je ne savais plus quoi lui dire. Il semblait décidé à rester là. Mais bon, il a raison. Nous sommes de la même famille, je ne risque rien. Je me changeais donc, un peu hésitante dans mes gestes tout de même. Il me fixait sans gêne et cela me perturbait.

-          Tu prends ton temps. Ca te plait en fait de t’exhiber devant moi, comme ça ? Il avait l’air amusé
-          N-non… Arrête de dire des conneries et vas plutôt payer tout ça.

Il sortait de la cabine, riant, la tenue à la main. Il semblait fier de lui. Je le remerciais pour ce cadeau. Au moment de régler ma nouvelle montre, je regardais l’heure sur mon portable et me rendais compte qu’il était déjà 17h30, j’abandonnais donc l’idée de retourner en cours pour la journée. Je devrais expliquer mon absence à Nathan ce soir et aux filles demain, ils n’apprécieront pas c’est sur. J’envoyais un message le soir même à Tom :

Moi : Merci beaucoup, je ne sais pas comment te remercier pour cette après-midi et pour ce cadeau !
Tom : Moi, je sais.

Je ne préférais pas répondre. Son message m’avait troublée. Je ne voulais pas comprendre ce qu’il avait voulu dire, j’avais peur de ce qu’il voulait dire. J’allais me coucher, Nathan n’étais pas encore rentré, il voyait des amis de longue date ce soir.

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