13h30, il arrive enfin. Ca fait maintenant 20 minutes que je
poirote. Décidemment, son caractère a changé lui aussi, mais ça fait tellement
longtemps qu’on ne s’est pas vus que je suis incapable de lui en vouloir. Nous
nous dirigeons vers un petit resto sympa, près de l’école. On commande chacun
une salade que nous mangeons vite pour parler plus tranquillement.
-
Alors,
les cours ca se passe bien ici ? Me
demande-t-il
-
Oui, j’aime
bien. J’ai eu ma première année haut-la-main en plus. Et toi, tu fais quoi
maintenant ? En fouinant un peu, je
devrais savoir comment il en est arrivé là
-
J’ai fais
une année de commerce mais j’ai arrêté. Maintenant, j’ai assez de fric pour
vivre confortablement trois vies sans travailler. S’expliqua-t-il en affichant un grand sourire
-
Et depuis
quand ? J’y suis presque
-
Au début
de l’été, mon grand-père paternel est mort et il se trouve qu’il nous avait
caché une grande partie de son argent, allant jusqu’à nous demander une aide
financière de temps en temps. Mais mon père est son unique héritier parce qu’il
n’a pas de frères et sœurs donc c’est nous qui avons tout reçu. Et me voilà
donc, riche jusqu’à ma mort, comme mon grand-père et mon père.
J’étais sans voix. Tom était mon cousin tu côté de ma mère
alors je n’étais pas au courant de la mort de son grand-père. Je n’étais pas
non plus au courant de sa situation financière.
-
C’est pas
mal. Je m’amuse plus comme ça, j’ai tout ce que je veux et je me tape qui je
veux quand je veux. Mais j’ai peur. J’ai peur de n’avoir plus rien à désirer
très vite. De me lasser de tout ça.
-
Je peux t’aider
à tout dépenser si tu veux ! Riais-je
Il riait aux éclats m’assurant qu’il n’en doutait pas.
-
Tu fais
quelque chose ce soir ? Me
demanda-t-il
-
Bah j’ai
une grosse journée moi aujourd’hui… J’ai cours jusqu’à 18h30 mais après
normalement non.
-
D’accord.
On se retrouve devant la grille à 16h30.
-
Mais…
-
Sois à l’heure.
Il avait l’air sérieux. Je lui avais pourtant dit clairement
que j’aurai cours jusqu’à 18h30… Mais il avait cette intonation dans la voix et
cet inhabituel air sérieux sur le visage… Je n’avais pas réussi à dire non.
Aucune négociation ne semblait possible.
« TUT TUT », un bruit de klaxon retentissait dans
la rue habituellement si calme. Il était 16h40 et je pressais le pas pour
arriver à la voiture coupée sport de Tom.
-
Je ne
sais pas ce que tu as prévu, Tom, mais je reprends les cours dans une demie
heure. Je te l’ai dit tout à l’heure. Lui
dis-je, un peu énervée
-
Du calme !
On va bien s’amuser tu vas voir. Et puis tu seras à l’heure, c’est bon. M’assura-t-il
Nous roulions à toute vitesse mais je n’osais pas faire de
remarque. Il conduisait n’importe comment, dépassait les limites de vitesse… Qui
sait, il avait peut-être acheté l’examinateur pour avoir son permis ? Ca
ne m’étonnerait pas plus que ça. Il ralentissait finalement pour rentrez dans
un sous-sol, le parking d’un centre commercial que je ne fréquentais que très
peu. Il était entièrement composé de boutiques de luxe dans lesquelles je ne
posais jamais un pied. Vous savez, ce genre de boutiques dans lesquelles on ne
se sent pas à sa place à moins de se balader avec 1000€ en cash dans les poches.
Ce genre de boutiques où les vendeuses sont aussi hautaines que les clientes,
où on se sent petite à moins de se trouver perchée sur de hauts escarpins. Ce
genre de boutiques où tu es perçue comme excentrique à moins d’être enfermée
dans un ensemble tailleur digne des plus grandes femmes d’affaires. Le genre de
boutiques dans lesquelles je n’ose pas entrer, par peur de faire tâche. Mais
Tom ne partageait visiblement pas mon point de vue et avait décidé de m'y traîner.
-
Je te
préviens Tom, je n’y entrerai pas. En plus, je n’ai pas de quoi me payer ce
genre de choses et tu le sais très bien…
-
Mmh mmh. Il ne semblait pas convaincu. T’en
penses quoi de la robe là ?
-
Elle est
magnifique mais elle coûte une blinde ! Et puis, elle ne m’ira jamais…
-
Aller
hop, on va l’essayer !
Il m’a coupé la parole et attrapé le bras avant même que je
ne puisse protester. En 5 minutes, j’avais croisé les regards interrogatifs
d’une dizaine de commères qui devaient déjà se demander ce qu’une fille comme
moi faisait dans une boutique comme ça avec un mec comme lui. J’étais
maintenant dans une cabine d’essayage qui faisait la même taille que deux cabines
dans mes magasins habituels. J’essayais la robe et restait fixée devant le
miroir. J’avais toujours aimé les belles choses et je devais avouer que cette
robe en était une à mes yeux. Cette robe aurait rendu belle n’importe quelle
femme qui se serait glissée dedans. Je tournais et me regardais dans les trois
miroirs mis à ma disposition. Tom entrait sans toquer ni prévenir et ajustait
la robe sur mes hanches.
-
Tu vois,
elle te va très bien. J’en étais sur. J’ai l’œil pour ce genre de choses.
-
Oui, elle
est jolie… Je ne parlais pas fort, je ne
voulais pas me faire remarquer
-
Il faut
que tu t’impose Lola. Parle fort, tant que tu es avec moi, tu es à ta place
ici. Tant que tu es avec moi, tu as de quoi acheter plus que toutes ces femmes
réunies.
-
Ca ne te fait
pas peur d’avoir tout cet argent ? Je veux dire, tu n’as pas peur de « mal
le dépenser », de faire une bêtise ou de ne plus rien avoir demain ?
-
Si, un
peu. Mais on s’y habitue et puis je me dis qu’il ne vaut mieux pas penser à ce
genre de choses, plutôt imaginer ce que je ferais de mon argent demain… Tiens,
je t’ai trouvé des chaussures, un sac et une montre pour aller avec,
essaye-les.
-
D’accord.
J’ajoutais les nouveaux éléments à la tenue. C’était
parfait. J’avais des étoiles dans les
yeux, je me trouvais vraiment belle dans cette tenue. Mais ma joie ne fut que
de courte durée, je revenais durement à la réalité de mon budget.
-
Pourquoi
tu fais ça ? Pourquoi tu me fais essayer tout ça en sachant que ça va me
plaire alors que je n’ai pas de quoi acheter ne serait-ce qu’une seule de ces chaussures ?
-
Parce que
c’est cadeau. Je t’offre la tenue entière.
-
Non ?
C’est une blague. Je peux pas accepter Tom ! C’est… c’est trop. Je n’en croyais pas mes oreilles
-
Non, je t’assure.
On ne se voit jamais alors je tiens à marquer le coup ! Considère ça comme
un petit cadeau, les 2 mois sont loin d’être écoulés. Change-toi, on va aller
payer.
Je commençais à enlever mes chaussures et les accessoires sans un mot. Il restait
planté derrière moi et ne semblait pas prévoir de bouger. Je le regardais
fixement dans l’espoir qu’il comprenne que j’avais envie qu’il parte mais il
faisait comme s’il ne comprenait pas et préférait s’assoir sur le petit
tabouret molletonné à côté de moi.
-
Il faut
que je me change, Tom.
-
Oui, on
aura du mal à payer sinon…
-
Non mais ça
veut dire qu’il faut que tu sortes.
-
Il y a la
place pour deux ici, je me trompe ?
-
Je ne te
parle pas de place, Tom !
-
Roh ça
va, on est de la même famille, non ? Tu n’as pas à être gênée. Tu peux te
déshabiller devant moi, je t’assure que ça ne me dérange pas.
-
Et moi
alors, tu ne penses pas que ça me dérange ?
-
Lola, c’est
moi qui te paye la tenue. Je pense y avoir droit non ? Je t’offre un
cadeau, c’est à ton tour. Il arborait un
sourire en coin qui n’avait rien de rassurant
Je ne savais plus quoi lui dire. Il semblait décidé à rester
là. Mais bon, il a raison. Nous sommes de la même famille, je ne risque rien. Je
me changeais donc, un peu hésitante dans mes gestes tout de même. Il me fixait
sans gêne et cela me perturbait.
-
Tu prends
ton temps. Ca te plait en fait de t’exhiber devant moi, comme ça ? Il avait l’air amusé
-
N-non…
Arrête de dire des conneries et vas plutôt payer tout ça.
Il sortait de la cabine, riant, la tenue à la main. Il
semblait fier de lui. Je le remerciais pour ce cadeau. Au moment de régler ma
nouvelle montre, je regardais l’heure sur mon portable et me rendais compte qu’il
était déjà 17h30, j’abandonnais donc l’idée de retourner en cours pour la
journée. Je devrais expliquer mon absence à Nathan ce soir et aux filles demain,
ils n’apprécieront pas c’est sur. J’envoyais un message le soir même à Tom :
Moi : Merci beaucoup, je ne sais pas
comment te remercier pour cette après-midi et pour ce cadeau !
Tom : Moi, je sais.
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